Faire son vinaigre

La méthode artisanale

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Le choix du vinaigrier

Pour lancer sa propre fabrication de vinaigre, il faut dans un premier temps choisir le vinaigrier : vinaigrier en grès provenant d’une des trois régions de France spécialisées dans ce genre de poterie (Saint-Amand-en-Puisaye dans la Nièvre, Noron-La-Poterie en Normandie ou Digoin en Saône-et-Loire), ou bien vinaigrier en bois, debout ou couché.

Dans le cas du tonnelet de bois, la précaution indispensable avant tout usage est de le remplir d’eau froide à ras bord et de le laisser reposer pendant vingt-quatre heures. En effet, le bois vit, se dilate et se rétracte en séchant, aussi est-il important d’en laisser gonfler les fibres afin d’empêcher toutes fuites ultérieures.

Le pot peut être équipé d’un robinet en verre, accompagné d’un bouchon en plastique alimentaire prévu pour assurer une parfaite et durable étanchéité du récipient. Les bouchons de liège et robinets en bois traditionnels sont en général proposés avec le vinaigrier.

Il ne faut jamais prendre d’objet métallique que l’acidité du vinaigre pourrait attaquer. Mieux vaut utiliser des ustensiles en verre, bois ou plastique.

Le remplissage

Pour un vinaigrier d’une contenance totale de 5 litres, il faut prévoir un remplissage à mi-niveau correspondant à la surface la plus large du récipient, soit environ 2,5 litres de liquide.

Il faut donc sélectionner 2 litres d’un bon vin rouge ou blanc, suivant le goût, et 0,5 litre de vinaigre, puis remplir le vinaigrier après l’avoir lavé. Cet apport initial de vinaigre acétifie déjà un peu le milieu, favorisant l’apparition des acétobacter. Sans lui, la production est tout à fait possible mais plus lente.

Une fois le vinaigrier rempli du mélange vin/vinaigre, il ne faut pas remettre le couvercle mais laisser cette préparation à l’air libre, afin que les bactéries acétiques, présentes naturellement dans les poussières de l’air, puissent se poser dans le vinaigrier. Elles trouveront là un terrain propice à leur développement et se multiplieront en surface, formant un voile léger. Ce voile de surface fin et scintillant, obtenu par la réunion des acétobacter, constitue la vraie « mère de vinaigre ».

Le soutirage

Le vinaigrier doit être placé dans un endroit relativement tempéré (15 à 20°C) et suffisamment aéré. Au bout de trois à quatre semaines, peut-être un peu plus la première fois, le vinaigre est prêt. A l’aide du robinet de vidange, on peut en soutirer un peu afin de le goûter et de juger de son acidité. S’il convient, il ne reste plus qu’à en remplir une bouteille, bien la fermer et la garder de côté quinze jours environ, de sorte que la lie ou autres impuretés se déposent au fond du flacon.

Le vinaigre va ainsi se clarifier et gagner en brillance.

Pour l’aromatiser, c’est à ce moment également qu’il faut glisser dans le flacon, selon les goûts, une feuille de menthe, une gousse d’ail, de l’échalote, du basilic…

Il ne faut jamais mettre d’ingrédients aromatiques directement dans le vinaigrier, cela pourrait détruire les bactéries. Ces deux semaines écoulées, il est bon de transvaser délicatement le vinaigre achevé et parfumé dans une nouvelle bouteille (peut-être décorative) en prenant soin de ne pas transférer de dépôts, et en filtrant si besoin.

A la suite de ce premier soutirage réussi, il faut réintroduire dans le récipient du vin nouveau à acétifier. Cette opération est essentielle et doit être menée avec beaucoup de délicatesse, car il ne faut surtout pas faire couler le voile moiré qui se maintient en surface. Les acétobacter ont besoin d’air pour oxyder l’alcool en acide acétique. Si l’on bouscule le vinaigrier ou si le remplissage est trop brusque, la « mère » va sombrer au fond du pot, le travail de transformation sera stoppé et il faudra attendre la formation d’une nouvelle pellicule de surface. C’est pourquoi il est conseillé de se servir d’un entonnoir que l’on inclinera sur le côté, afin que le liquide nouveau ruisselle le long des parois sans malmener la surface. Ces opérations de soutirage et remplissage doivent suivre l’évolution du vinaigre. Il est exclu de tirer un peu de vinaigre au robinet chaque fois que l’on souhaite faire un assaisonnement. La dose minimale est la valeur d’une bouteille à chaque fois.

La fabrication du vinaigre faisant intervenir des organismes vivants, il faut surveiller très régulièrement le processus de transformation afin de pouvoir ajuster les apports en alcool. Il est essentiel de savoir que, si on laisse le vinaigrier sans soin, son contenu va dépérir. En effet, comme les acétobacter ne peuvent s’arrêter de travailler, après avoir fini de transformer tout l’alcool du vin en vinaigre, ils s’attaqueront alors à l’acide acétique lui-même, et le détruiront. Il ne restera plus alors dans le vinaigrier qu’un mélange d’eau et de gaz carbonique.

Riche de tous ces éléments, c’est un vrai plaisir que de fabriquer son vinaigre maison, de l’aromatiser de mille et une façons selon son imagination culinaire, pour créer un produit unique, souvent particulièrement parfumé car bénéficiant de l’ensemble des bouquets des bons vins mis à acétifier.

L'acetimetre

Les amateurs de vinaigre désireux de connaître avec précision le degré d’acidité de leur production, peuvent avoir recours à un acétimètre de leur fabrication, ce type de matériel n’étant pas encore propose aux particuliers. Mais la méthode retenue reste accessible.

Le dosage ne s’effectue en versant goutte à goutte de la soude normale (0,1 N) sur un échantillon de 10 ml de vinaigre, auquel on a ajouté un indicateur coloré (3 à 4 gouttes) de phénolphtaléine). Dès que la solution change de teinte, il faut multiplier le volume de soude utilisé par 0,601 pour obtenir le degré acétique.

Par exemple, si 12 ml de soude ont été nécessaires pour faire virer l’échantillon, le vinaigre mesuré titre donc 12 x 0,6 soit 7,2 degrés acétiques.

Source : Le vinaigre dévoilé, Caroline Lefebvre, Aubanel, 2000